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Validité de l’action en revendication des archives de campagnes napoléoniennes

Civil - Personnes et famille/patrimoine
Public - Droit public général
25/06/2018
Dans un arrêt rendu le 12 juin 2018, la première chambre civile de la Cour de cassation prononce la validité de l’action en revendication des archives de campagnes napoléoniennes du général de Chasseloup-Laubat.
Le descendant du général de Chasseloup-Laubat (lequel a commandé le corps du génie pendant plusieurs campagnes napoléoniennes) avait été condamné à remettre au ministère de la Défense la totalité des documents revendiqués (établis par le général), sur le fondement de l'article L. 211-4 du Code du patrimoine. Il n’est pas fondé à invoquer l'irrecevabilité de l'action en revendication pour non-respect par le ministre de la formalité de la mise en demeure requise en vertu de l'article R. 212-7 du Code du patrimoine, dès lors que cette exigence est prescrite par un texte qui n'est entré en vigueur que le 19 septembre 2009, et que l’action en revendication avait été engagée antérieurement. Telle est la solution de l’arrêt rendu le 12 juin 2018 par la Cour de cassation.

Pour rappel, les documents en cause sont à l'origine d'un contentieux qui s'éternise depuis de nombreuses années, porté devant les juridictions administratives, puis devant le Tribunal des conflits (T. confl., 9 juill. 2012, n° 3857), puis devant la Cour de cassation (Cass. 1re civ., 21 oct. 2015, n° 14-19.807, FS-P+B+I), pour revenir à nouveau devant elle en 2018.

Le descendant du général avait d’abord soulevé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) à l'encontre de l'article L. 211-4 du Code du patrimoine, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2009-483 du 29 avril 2009. Dans un arrêt rendu le 10 janvier 2018, la Cour de cassation a jugé qu’il n’y avait pas lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la QPC ainsi soulevée devant elle, portant sur la question du caractère public ou privé de ces archives de campagnes napoléoniennes (Cass. 1re civ., 10  janv. 2018, n° 17-19.751, FS-D ; lire l'actualité du 12/01/18 : "Caractère public ou privé des archives de campagne napoléoniennes : la QPC jugée irrecevable").

Validité de l'action

Dans son arrêt rendu le 12 juin 2018, la Cour suprême rejette le moyen soulevé par le requérant tiré de l'irrecevabilité de l'action en revendication pour non-respect par le ministre de la formalité de la mise en demeure préalable.

En effet, ainsi que le relève la Haute juridiction, l'article 4-1 du décret n° 79-1037 du 3 décembre 1979, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1124 du 17 septembre 2009, devenu l'article R. 212-7 du Code du patrimoine (article qui impose à l'auteur de l'action en revendication prévue à l'article L. 212-2 du même code, d'adresser préalablement une mise en demeure, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au détenteur des archives et, le cas échéant, à la personne qui procède à leur vente), n'est applicable qu'aux actions engagées après son entrée en vigueur, le 19 septembre 2009. 

Aussi, elle approuve les juges d’appel. Ces derniers avaient d’abord constaté qu'à la suite d'une opposition à leur vente, le ministre de la Défense avait saisi le juge administratif en 2006 d'une action en revendication des archives. Ils avaient ensuite relevé que le ministre avait introduit parallèlement une instance devant le juge judiciaire, le 18 décembre 2009, avant la décision du Tribunal des conflits désignant l'ordre juridictionnel compétent pour connaître de l'action en revendication d'archives publiques. Ils avaient enfin retenu que le requérant avait soulevé vainement l'irrecevabilité de l'action en revendication pour non-respect par le ministre de la formalité de la mise en demeure, dès lors que cette exigence est prescrite par un texte qui n'est entré en vigueur que le 19 septembre 2009.
 
Ayant ainsi fait ressortir, en présence d'une incertitude sur l'ordre juridictionnel compétent, que l'action en revendication, au sens de l'article R. 212-7 précité, avait bien été engagée avant l'entrée en vigueur de ce texte, la cour d'appel a légalement justifié sa décision.

Par Anne-Lise Lonné-Clément
Source : Actualités du droit