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Nouveau cadre d’analyse pour les demandes de protection fondées sur le refus d’un mariage forcé

Civil - Personnes et famille/patrimoine
22/08/2018
Dans deux décisions rendues le 23 juillet 2018, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) redéfinit la notion de « groupe social », utilisée notamment dans son analyse pour les demandes de protection fondées sur le refus d'un mariage forcé.
Si au sein d’une population, le mariage forcé est couramment pratiqué au point de constituer une norme sociale, les jeunes filles et les femmes qui entendent se soustraire à un mariage imposé contre leur volonté constituent de ce fait un groupe social, au sens de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. Telle est la définition du groupe social des personnes victimes de mariages forcés donnée par la Cour nationale du droit d’asile, à l’occasion de deux décisions rendues le 23 juillet 2018.

En l'espèce, deux femmes originaires de Guinée et du Mali, victimes de mariages imposés et précoces, avaient formé deux demandes d’asile, rejetées par le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA).

Dans sa décision, la cour décide de modifier la définition du « groupe social » utilisée depuis 2006 pour rendre compte de ce type spécifique de persécution. Pour énoncer la nouvelle définition susvisée, elle s’inspire de celle employée par le Conseil d’État et la CNDA en matière d’excision depuis 2012.

La Cour rappelle également que l’appartenance à ce groupe est un fait social objectif qui ne dépend pas de la manifestation par ses membres de leur appartenance à ce groupe et qu’il appartient aux personnes se prévalant de leur appartenance à un tel groupe de fournir l’ensemble des éléments circonstanciés, notamment familiaux, géographiques et sociologiques, relatifs aux risques de persécution qu’elles encourent personnellement.

Elle prend en considération cette nouvelle définition dans les cas d’espèce et estime que, soumises à des viols conjugaux et à des mauvais traitements graves durant leur adolescence, les intéressées, qui ne peuvent recourir utilement à la protection des autorités de leur pays d’origine, doivent se voir reconnaître la qualité de réfugiées.

Par Marie Le Guerroué
Source : Actualités du droit