<< Retour aux articles
Image

Le tribunal disqualifie d’office leur avocat : la CEDH reconnaît une violation du droit à un procès équitable

Pénal - Procédure pénale
25/01/2019
Le fait pour un tribunal d’avoir privé les requérants de représentation après avoir soulevé d’office la question de la capacité de leur avocat à agir et sans qu’ils n’en aient été informés, aient été entendus et mis en condition de remédier à l’irrégularité, a rendu le procès inéquitable. Ainsi statue la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), dans une décision du 22 janvier 2019.

Les requérants, représentés par une association genevoise des locataires agissant notamment par l’intermédiaire d’un avocat, ouvrirent une action en fixation du loyer initial devant un tribunal fédéral suisse. Cependant, le tribunal dénia à leur avocat la capacité d’agir devant lui sans leur avoir donné la possibilité de se prononcer à ce sujet. Ils invoquent devant la CEDH la violation de leur droit à un procès équitable.

La Cour note que les requérants ont été pris au dépourvu par la tournure imprévisible et inattendue que la décision du tribunal fédéral de disqualifier leur avocat a donnée à la procédure.

Elle rappelle, ensuite, que le principe du contradictoire commande que les tribunaux ne se fondent pas dans leur décision sur des éléments de fait ou de droit qui n’ont pas été discutés durant la procédure et qui donnent au litige une tournure qu’aucune partie n’aurait été en mesure d’anticiper. Elle rappelle également que le principe du contradictoire et celui de l’égalité des armes exigent que chacune des parties à un litige reçoive une possibilité raisonnable de représenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son ou ses adversaires.

Elle estime, en l’espèce, que le tribunal fédéral a privé les requérants de représentation après avoir soulevé d’office la question de la capacité de l’avocat à agir et sans que les requérants n’en aient été informés, qu’ils aient été entendus et mis en condition de remédier à l’irrégularité, comme la loi le prévoyait expressément. La Cour considère que la décision du tribunal fédéral de priver les requérants de représentation, prise en l’absence de contradictoire, les a, de ce fait, objectivement placés dans une situation de net désavantage par rapport à la partie adverse, laquelle était valablement représentée. Elle conclut donc qu’une atteinte a été portée au droit des requérants et qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH).

Par Marie Le Guerroué

Source : Actualités du droit