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Assurance-vie : nécessaire connaissance par l’assureur de la substitution d’un bénéficiaire avant le décès du souscripteur

Civil - Personnes et famille/patrimoine
Affaires - Assurance
03/07/2019
L’envoi des dernières volontés du souscripteur d’un contrat d’assurance-vie ultérieurement au décès de celui-ci est inopposable à l’assureur qui se doit de dénouer ledit contrat dans les termes connus au moment du décès.
Lors de son adhésion à la garantie décès d’un contrat d’assurance sur la vie, le stipulant avait désigné son fils ou, à défaut, son épouse, comme bénéficiaire des sommes garanties. Par lettre du 20 juin 1982, il avait fait part à l’assureur de la modification de la clause bénéficiaire en faveur de son épouse qui à la suite du décès de son époux survenu en 1990, a obtenu de l’assureur le règlement du capital garanti, versé en octobre 1991. Le fils se prévalant de l’intention de son père de le désigner en définitive comme unique bénéficiaire du contrat d’assurance, a assigné la bénéficiaire en restitution de ce capital.

Faisant droit à la demande du requérant, la cour d’appel s’est appuyée sur l’existence d’un testament olographe du 10 août 1987 dans lequel le défunt avait révoqué toute donation faite au profit de son épouse, et institué son fils légataire universel.
De plus, le 7 août 1987, le défunt avait écrit à son notaire pour désigner son fils comme seul et unique héritier et expressément indiqué, dans un écrit du 29 juillet 1987 et signé, que le capital-décès de son assurance-vie revenait à son fils. Ainsi, ce document, certes autonome par rapport au testament olographe, comportait incontestablement une intention révocatoire de la clause bénéficiaire et avait donc pour effet de détruire valablement l’attribution primitive du capital-décès à son épouse.

La bénéficiaire du contrat a alors formé un pourvoi en cassation auprès de la deuxième chambre civile qui, par arrêt du 13 juin 2019, a censuré la décision rendue par les juges du fond se fondant sur l’article L. 132-8 du Code des assurances dans sa rédaction applicable au litige.
« Attendu qu’il résulte de ce texte que l’assuré peut modifier jusqu’à son décès le nom du bénéficiaire du contrat d’assurance sur la vie, dès lors que sa volonté est exprimée d’une manière certaine et non équivoque et que l’assureur en a eu connaissance ; qu’en l’absence de désignation d’un bénéficiaire dans la police ou à défaut d’acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre ; que cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu’avec l’accord de l’assuré, lorsque celui-ci n’est pas le contractant ; que cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d’avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l’article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire ».

Or, ayant constaté que les dernières volontés de l’assuré avaient été envoyées à l’assureur le 18 octobre 1991, soit postérieurement au décès du souscripteur, « ce dont il résultait que l’assureur n’en avait pas eu connaissance du vivant de l’assuré, et alors qu’elle n’a pas caractérisé que cet écrit constituait un testament olographe dont le fils aurait été fondé à se prévaloir, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé ».

Cette décision constitue un rappel des règles de substitution du bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie selon lesquelles « dans les assurances sur la vie, l'assuré peut modifier jusqu'à son décès la répartition du capital entre les bénéficiaires, dès lors que la volonté du stipulant est exprimée d'une manière certaine et non équivoque, et que l'assureur en a eu connaissance » (voir dans ce sens, Cass. 2e civ., 13 sept. 2007, n° 06-18.199, Bull. civ. II, n° 215, RGDA 2008, p. 183, note Kullmann J., Resp. civ. et assur. 2007, comm. 370, JCP N 2008, n° 1007).
Source : Actualités du droit